Je suis à Kiev, au terme d'une visite au rythme soutenu des opérations de l'OIM en Ukraine et en République de Moldova.
La nuit dernière, les sirènes m'ont réveillée et j'ai été amenée d'urgence dans un bunker de mon hôtel. Oui, j'ai eu peur, mais ce n'est pas la raison pour laquelle j'écris ces lignes. J'ai maintenant un aperçu de ce que des millions d'Ukrainiens et l'ensemble de mon personnel endurent depuis 18 mois.
Lorsque l’alerte a pris fin, j'ai été profondément attristée d'apprendre que deux personnes avaient trouvé la mort dans cet attaque : deux autres vies fauchées, d'autres familles avec des places vides à leur table.
Et aujourd'hui, ma visite en République de Moldova et en Ukraine se poursuit.
Même si je n'ai pas toujours l'impression d'être dans la capitale d'un pays en guerre, son ombre est toujours présente. De mon périple du Moldova jusqu’à Odessa, en passant par les champs de blé et de tournesols pour rejoindre Kiev, je vois à quel point la guerre a changé l'Ukraine et son peuple.
Il faut voir l'Ukraine pour vraiment comprendre ce que son peuple endure, et bien que je ne sois pas allée dans l'est marqué, ni à Marioupol, la ville sinistrée, ce que j'ai vu et entendu ces derniers jours m'a laissée admirative de la volonté du pays de se relever et de se développer.
Dans les villes de Pologne, au sein des nouvelles entreprises que les Ukrainiens créent au Moldova, lors de mes réunions avec les communautés et les responsables moldaves et ukrainiens, j'ai entendu un mot à maintes reprises : relèvement.
Ce mot témoigne de la force intérieure d'un peuple qui a vécu - et vit encore - les horreurs de la guerre. Il illustre également la détermination de la communauté internationale et du multilatéralisme.
Nous nous sommes engagés à ne pas oublier l'Ukraine ; nous nous sommes engagés à aider le pays et son peuple à rebondir.
Plus de 4,7 millions d'Ukrainiens sont rentrés chez eux, dont un million depuis l'étranger. Ils savent où ils se sentent chez eux et veulent prendre leur avenir en main.
Et c'est précisément ce que nous les aidons à faire. Plus de cinq millions de personnes ont reçu une aide directe de l'OIM, sous forme de nourriture, d'eau, de soins de santé, d'abris, de subventions en espèces, de soins de santé mentale et, surtout, d'abris, y compris les réparations de maisons.
En entrant dans Kiev depuis Odessa, nous nous sommes arrêtés à Bila Tserkva, qui a subi une lourde attaque l'année dernière. Nous avons vu comment l'OIM et ses partenaires internationaux ont réhabilité une station d'eau desservant 250 000 personnes, et réparé les égouts et les installations de chauffage endommagés. C'est ce genre de travaux qui aideront les Ukrainiens à affronter l'hiver à venir avec une lueur de confiance.
Nous avons également visité l'hôpital local, lui aussi fortement endommagé par les attaques aériennes. C'est l'un des 463 bâtiments d'infrastructure clés que l'OIM a aidé à rénover.
Mais le relèvement ne se résume pas à des briques, du mortier, des tuyaux et des câbles.
Il s’agit de personnes.
A Bila Tserkva, nos programmes offrent des subventions aux coiffeurs et esthéticiens, aux tailleurs, aux comptables et aux baristas. Nous aidons les gens à retrouver du travail aujourd'hui et leur donnons l'espoir d'un avenir meilleur.
Notre programme de subventions aux entreprises a soutenu 500 petites et microentreprises touchées par la guerre et les a aidées à conserver plus de 4 000 postes de travail et à créer plus de 1 700 nouveaux emplois.
Nous aidons également les Ukrainiens à guérir leurs blessures invisibles en surmontant la stigmatisation lorsqu’ils recherchent un soutien en matière de santé mentale. Nous proposons ainsi un accompagnement individuel et des activités psychosociales communautaires ainsi qu'un tutorat pour les professionnels locaux de la santé mentale.
Je pense également au demi-million de non-Ukrainiens qui ont dû partir après l'invasion et qui sont dispersés dans toute l'Europe et dans le monde entier. Il s'agissait d'étudiants, de travailleurs migrants, d'entrepreneurs et de personnes à la recherche d'une vie meilleure. Ces personnes, et d'autres comme elles, joueront un rôle considérable dans la reconstruction et le redéveloppement de l'Ukraine, lorsque la guerre aura pris fin, comme elle doit le faire.
Alors que j'attendais le feu vert pour sortir du bunker, les mots d'une jeune mère, une réfugiée ukrainienne que j'ai rencontrée en République de Moldova au début de mon périple, ont résonné en moi. « Cette guerre nous a unis comme jamais auparavant. Je n'aurais jamais imaginé à quel point nos liens sont forts, à quel point nous sommes là les uns pour les autres ».
Les défis sont immenses et il y aura d'autres pertes humaines, d'autres communautés dévastées. Et pourtant, des millions de personnes travailleront sans relâche pour améliorer l'avenir de leur famille et soutenir le relèvement de leur pays. Nous le savons. C'est pourquoi nous restons. C'est pourquoi je suis ici.