Somalie – Après trois décennies de conflits prolongés et de crises humanitaires, la Somalie compte l’une des populations les plus importantes de personnes déplacées dans le monde. La communauté humanitaire estime à 2,9 millions le nombre de déplacés internes dans le pays, sans compter le million de personnes déplacées depuis 2021 en raison de la sécheresse. Le conflit armé et les risques climatiques restent les principaux facteurs de déplacement, l'augmentation des crises liées au climat exerçant des pressions supplémentaires sur les communautés.
Voici quatre défis auxquels sont confrontées les personnes déplacées en Somalie, et la façon dont l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) y répond.
Expulsions forcées
Lorsque les personnes se déplacent, elles se dirigent généralement vers les grandes villes qui n'ont pas la capacité à absorber la population croissante. À leur arrivée, les déplacés internes n'ont d'autre choix que d'établir des structures d'habitation sur des terrains privés vacants où ils sont constamment menacés d'expulsion. Depuis 2017, plus de 1,1 million de personnes, en majorité des déplacés internes, ont été expulsées des lieux où elles s’étaient installées dans toute la Somalie, selon le tableau de bord du suivi des expulsions du Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC). Le plus souvent, les déplacés internes ne reçoivent aucun préavis avant la destruction de leurs abris et doivent se débrouiller seuls pour trouver un nouvel endroit où vivre.
Comment l'OIM apporte-t-elle son aide ? Solutions durables au déplacement
Permettre aux communautés d'accéder à des logements plus permanents est l'une des missions principales de l'OIM. L'Organisation déploie des efforts pour fournir des solutions plus durables au déplacement à travers trois initiatives phares.
- Saameynta (2022 - 2025), financé par les Pays-Bas et la Suisse
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L'OIM dirige la mise en œuvre du programme Saameynta pour améliorer les conditions de vie de plus de 75 000 personnes déplacées vivant dans les villes de Baidoa, Bossaso et Beletweyne.
Signifiant « impact » en somali et à travers ses diverses interventions, le projet Saameynta renforce l'intégration des déplacés internes dans leurs nouvelles communautés, diversifie leurs moyens de subsistance et leur offre des logements et des emplois plus permanents.
Au cours de la première année du projet, l'OIM a soutenu la révision et la mise à jour du plan d'action communautaire intégré du district de Baidoa (CAP) afin d'identifier les priorités visant à promouvoir des services tels que l'eau, l'assainissement et l'hygiène, la planification de l'extension de la ville et des solutions de logement durables et économiques. Grâce à ce plan, les partenaires de Saameynta travailleront également avec les communautés pour trouver de nouveaux moyens de subsistance, notamment en développant des systèmes d'irrigation dans le district de Baidoa.
- Projet de réinstallation de Baidoa (2017 - 2020), avec la contribution financière du Japon, du Royaume-Uni, des États-Unis et de l'Union européenne
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Baidoa, grande ville de l'État du Sud-Ouest en Somalie, accueille actuellement l'une des plus grandes populations de déplacés internes du pays.
Afin d'apporter une solution à plus long terme au déplacement et d'atténuer le risque croissant d'expulsion à Baidoa, début 2018, le gouvernement de l'État du Sud-Ouest a alloué des terres publiques pour réinstaller les familles déplacées les plus à risque d'expulsion.
Grâce au projet et en collaboration avec différents partenaires, l’OIM a coordonné le développement du site, en faisant participer la communauté dès le début pour s'assurer qu'elle prenne part à la conception et à la planification de ce qui était censé être leur nouveau foyer.
Depuis août 2022, environ 12 000 personnes ont été relogées. Chaque famille a reçu une aide en espèces et une parcelle de terrain pour reconstruire sa vie dans un environnement sûr et sécurisé.
Pour en savoir plus sur le projet, cliquez ici.
- Consortium de solutions durables de Danwadaag (2018 - 2022), financé par le Royaume-Uni
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Le Consortium de Danwadaag* a renforcé les progrès vers des solutions durables et la (ré)intégration des communautés ciblées touchées par les déplacements dans l'État du Sud-Ouest, à Banadir et au Jubaland.
Les activités du consortium sont concentrées sur le développement d'un environnement favorable à des solutions à long terme au déplacement par le biais du renforcement des capacités du gouvernement, de la fourniture de services de base durables intégrés, de la sécurité foncière et du logement, de la terre et de la propriété et de programmes de moyens de subsistance ciblés pour les plus vulnérables.
Pour en savoir plus sur les activités du projet et son impact, cliquez ici.
Changements climatiques
Les sécheresses et les inondations récurrentes déplacent chaque année un grand nombre de personnes en Somalie.
Ces événements climatiques accélèrent également la dégradation environnementale des terres et réduisent encore davantage les rares ressources naturelles, affectant non seulement le mécanisme d'adaptation des communautés agro-pastorales, mais les forçant également à migrer et à se battre pour le contrôle des rendements écologiques décroissants.
La plupart des personnes touchées sont plus susceptibles d'être recrutées par des groupes terroristes ou armés, en particulier les jeunes.
Comment l'OIM apporte-t-elle son aide ? Programmes d'adaptation au climat
L'OIM intègre des approches d'atténuation et d'adaptation au climat dans la plupart de ses projets afin de s'assurer que les déplacés internes, les migrants et les communautés vulnérables sont mieux préparés à faire face aux effets des changements climatiques et à prévenir de futurs déplacements.
Ces approches environnementales visent à répondre aux besoins humanitaires et à ceux du développement, qui sont aggravés par les inondations et les sécheresses récurrentes. Les interventions s'inscrivent dans le cadre du Nexus Humanitaire-Développement-Paix, s'attaquant à la fois aux effets immédiats des risques naturels par un appui vital, tout en mettant en œuvre des projets à plus long terme qui peuvent contribuer à accroître la résilience des communautés face aux changements climatiques.
- Deegaan Bile : Breaking the Climate-Conflict Cycle in Galmudug and Hirshabelle (2022 - 2023), financé par l'Union européenne
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Rompre le cycle climat-conflit vise à réduire les déplacements et les conflits liés aux ressources et induits par les changements climatiques à Galmudug et Hirshabelle, deux États du centre de la Somalie où les effets néfastes des changements climatiques contribuent à l'augmentation du risque de conflit violent. Le projet fournit des solutions durables pour renforcer la résilience des communautés somaliennes et les préparer aux chocs climatiques. Il vise également à renforcer la stabilité dans une région où les communautés s’affrontent depuis toujours pour le contrôle de ressources naturelles qui se raréfient.
- S'attaquer aux facteurs et faciliter une migration sûre, ordonnée et régulière (2021 - 2023), financé par le Fonds fiduciaire multipartenaires pour les migrations
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L'objectif de ce projet régional est d'aider les gouvernements dans la région de l'Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) à faire face aux changements climatiques en tant que moteur de la migration et à faciliter la mobilité comme moyen d'adaptation aux changements climatique.
- Identifier des solutions d’adaptation au climat pour les déplacements en Somalie (2019 - 2021), financé par le Fonds de l’OIM pour le développement
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L'objectif du projet était de contribuer à une base de données et de connaissances améliorée sur la résolution à long terme des déplacements sensibles au climat et sur la résilience accrue aux changements climatiques en Somalie. L'OIM en Somalie a aidé le gouvernement somalien et les partenaires internationaux à identifier des solutions d’adaptation au climat liées à la résolution à long terme des déplacements urbains par le biais de recommandations d'évaluation pour l’élaboration de politiques et d'interventions communautaires.
Le rapport final et les recommandations peuvent être consultés ici.
Manque d'accès à l'eau, aux abris et aux soins de santé
Les populations déplacées en Somalie résident principalement dans plus de 2 400 établissements informels surpeuplés où l'accès aux services de base comme la santé, l'eau, les abris et la nourriture est un gros défi. Les déplacés internes, en particulier les femmes, les filles et les personnes handicapées, ont toujours été victimes de discrimination et privés de services équitables dans ces zones d'habitation. En outre, la plupart des personnes déplacées ne retourneront pas dans leur lieu d'origine et ont du mal à s'intégrer dans leurs nouvelles communautés.
Comment l'OIM apporte-t-elle son aide ? Infrastructures, argent liquide, informations et renforcement des capacités
Les équipes de l'OIM sont présentes dans les villes et villages qui accueillent et reçoivent un grand nombre de populations déplacées. Depuis des années, l'OIM travaille en étroite collaboration avec les autorités locales pour élargir l'accès des personnes déplacées à l'eau, à l'hygiène, à l'assainissement, aux abris et aux services de soins de santé.
- Programmes humanitaires et d'intervention d'urgence, avec la contribution financière du CERF, du Japon, du Royaume-Uni, des Etats-Unis et de l'Union européenne
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Grâce à ses différents programmes d'urgence, l'OIM fournit aux populations déplacées une aide humanitaire vitale telle que l'eau, l'assainissement, l'hygiène, les abris et les soins de santé.
Les programmes humanitaires de l'OIM sont également axés sur l'accès à long terme de ces communautés aux services essentiels. En collaboration avec les communautés et les partenaires locaux, l'OIM construit et réhabilite les infrastructures d'eau et de santé tout en promouvant les moyens de subsistance par le biais d'une formation aux compétences et aux capacités. Les projets sont mis en œuvre en collaboration avec les communautés, afin de répondre à leurs priorités et à leurs besoins. Une fois le projet terminé, l'entretien des infrastructures et des systèmes créés est confié aux communautés afin d'en assurer la durabilité.
- Programme d'intervention minimum (2022 - aujourd'hui), financé par le Royaume-Uni
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En avril, l'OIM a lancé un dispositif d'intervention minimum (MRP) en partenariat avec le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), le Programme alimentaire mondial (PAM) et d'autres partenaires afin de répondre aux besoins les plus urgents en matière d'eau, d'assainissement, de santé, d'abri et de nourriture des familles déplacées par la sécheresse.
Le MRP élargit également l'accès à l'eau, aux latrines et aux services de santé au niveau communautaire grâce à une approche par zone. Pour en savoir plus, cliquez ici.
- Projet d'approvisionnement en eau et d'assainissement en milieu urbain de Kismayo-Baidoa (2019 - 2023), financé par la Banque africaine de développement
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Le projet vise à réduire l'exclusion économique et sociale des groupes les plus vulnérables en améliorant l'accès à l'eau pour les communautés d'accueil et de déplacement. En outre, il vise à renforcer les connaissances nationales sur la disponibilité et la qualité des ressources en eaux de surface et souterraines, offrant la possibilité d'une utilisation réglementée et durable de l'eau dans des contextes fragiles.
Kismayo et Baidoa - où le projet est mis en œuvre - sont deux centres urbains du sud de la Somalie qui connaissent une forte urbanisation due au déplacement des populations rurales vers les villes.
Défis en matière de protection et hausse de la violence fondée sur le genre
Les femmes et les filles déplacées sont très exposées en Somalie, car elles vivent souvent sans abri permanent ; elles sont victimes de viols, de harcèlement sexuel et de violences domestiques. En cas de crise, elles sont les plus exposées à la violence fondée sur le genre et aux mariages précoces et forcés. Les auteurs exploitent souvent leur vulnérabilité, les prenant pour cible lorsqu'elles quittent les camps pour effectuer des tâches domestiques ou aller chercher de l'eau dans des puits éloignés.
Comment l'OIM apporte-t-elle son aide ? Protection, sensibilisation et services pour les femmes et les filles
L'OIM s'engage à améliorer la disponibilité des services de santé mentale et de soutien psychosocial (SMSPS) pour les communautés et à comprendre comment mieux signaler et répondre aux cas de violences fondées sur le genre.
L'OIM organise également des ateliers et des activités de sensibilisation dans les zones de déplacement pour inviter les femmes et les hommes à discuter de la violence fondée sur le genre et des moyens de l'éliminer.
- Autonomisation, leadership et développement économique des femmes
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L'OIM a soutenu la création et le développement de comités et de groupes de femmes réunissant des centaines de membres dans les régions de Somalie touchées par les déplacements liés à la sécheresse. Au fil des ans, à la demande des membres, les activités comprenaient aussi bien des formations et des ateliers sur les droits, les rôles et les femmes dans des positions de leadership, que des activités concentrées sur l'autonomisation économique, en formant les femmes au développement de l'artisanat et aux compétences de base en calcul, tout en leur fournissant également du matériel et un soutien en nature pour favoriser la croissance de leur entreprise.
- Cartographier les services pour les victimes et les populations à risque
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L'OIM déploie des équipes dans les sites de déplacement afin de recenser les services SMSPS et de lutte contre la violence fondée sur le genre. Grâce à cette cartographie, l'OIM vise à mieux comprendre comment les victimes sont aidées dans les sites et à améliorer la disponibilité des services pour les femmes et les filles. En période de sécheresse, on constate une augmentation des cas de violences fondées sur le genre, notamment dans les sites qui accueillent un grand nombre de personnes mais dont la superficie n'augmente pas.
L'OIM a récemment été désignée comme l'agence des Nations Unies co-présidant le groupe de travail sur l'engagement et la responsabilité communautaires en Somalie et dirigera les efforts visant à garantir un engagement plus direct et innovant avec les communautés afin de prévenir les violences contre les femmes et les filles.
- Des services adaptés aux besoins des femmes et des filles
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Le manque d'accès à l'eau potable, à l'assainissement et à l'hygiène (WASH) a un impact disproportionné sur les femmes et les filles. Qu'il s'agisse du temps qu'elles passent à aller chercher de l'eau ou de leurs besoins spécifiques, les femmes bénéficient largement des efforts déployés pour renforcer les systèmes d'approvisionnement en eau et d'assainissement.
Pour répondre à la sécheresse actuelle, l'OIM a amélioré l'accès à l'eau potable, aux services d'assainissement et de promotion de l'hygiène pour les communautés vivant dans les districts les plus touchés. La réhabilitation et la construction de sources d'eau ont notamment permis de réduire la peur de la violence, largement répandue chez les femmes et les jeunes filles. Le fait de passer moins de temps à atteindre la source d'eau atténue le risque de violence.
Des efforts ont également été faits pour répondre aux besoins d'hygiène menstruelle des femmes et des jeunes filles vivant dans les sites. Par exemple, du matériel d'hygiène menstruelle, comme des serviettes réutilisables et des serviettes jetables, est désormais fourni aux femmes et aux filles. Les latrines hommes-femmes sont séparées et peuvent être verrouillées afin de réduire le risque de violences sexuelles.
L'OIM organise également des ateliers et des activités de sensibilisation dans les zones de déplacement pour inviter les femmes et les hommes à discuter de la violence fondée sur le genre et des moyens de l'éliminer.